Saint Damien de Molokai (1840-1889), apôtre des lépreux

Le Père Damien est, avant tout, un témoin de l’amour de Dieu pour les hommes. Il puise sa force dans l’Eucharistie, présence de Dieu au milieu des hommes, et dans l’adoration sans laquelle il n’aurait jamais pu tenir. C’est là qu’il reçoit pour lui-même d’abord l’appui et l’encouragement, la consolation et l’espoir qu’il s’empresse de partager aux lépreux… Il contractera lui-même la maladie.

Qui est Damien de Molokai – Sa vie.

Le Père Damien passait des heures devant le Saint-Sacrement. « Je trouve ma consolation dans mon unique compagnon qui ne me quitte plus, c’est-à-dire notre divin Sauveur dans la Sainte Eucharistie. » Grâce au P. Damien, l’enfer de Molokaï, fait d’égoïsme, de brutalité et de désespoir, se transforme peu à peu en une communauté authentique.

« C’est au pied de l’autel que nous trouvons la force nécessaire dans notre isolement. Sans le Saint-Sacrement, une position telle que la mienne ne serait pas soutenable. Mais ayant notre Seigneur à mes côtés, eh bien ! je continue d’être toujours gai et content. Avec cette gaieté de cœur et le rire sur les lèvres, je travaille avec zèle au bien des pauvres malheureux lépreux et petit à petit, sans trop d’éclat, le bien se fait… [Jésus au Saint-Sacrement] est le plus tendre des amis avec les âmes qui cherchent à Lui plaire. Sa bonté sait se proportionner à la plus petite de ses créatures comme à la plus grande. Ne craignez donc pas dans des conversations solitaires, de L’entretenir de vos misères, de vos craintes, de vos ennuis, de ceux qui vous sont chers, de vos projets, de vos espérances, faites-le avec confiance et à cœur ouvert. » (lettre à son frère, 13 déc 1881)

“Venez à Moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et Moi je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes. Oui, mon joug est aisé et mon fardeau léger. ” (Mt 11, 28-30)


Chronologie

1840 : 3 janvier, Naissance de Joseph de Veuster, au village de Tremelo, en Belgique.
1858 : Joseph entre à l’école moyenne de Braine-le-Comte (Belgique) pour y apprendre le francais.
1859 : 2 février, Joseph de Veuster prend l’habit religieux chez les Pères des Sacrés-Cœurs de Picpus à Louvain, en Belgique. Il prend le nom de Damien et rejoint ainsi son frère Pamphile dans le même Institut.
1863 : Départ pour les îles Hawaï, le 30 octobre
1864 : 4 mai, Ordination sacerdotale en la cathédrale d’Honolulu, à Hawaï.
1873 : Le Père Damien de Veuster est missionnaire dans les diverses îles de l’Archipel des Hawaii dans le Pacifique. Ouverture de la léproserie de Molokaï en 1866.
1873 : 10 mai, entrée du Père Damien à la léproserie de Molokaï.
1884 : En fin de cette année, le Père Damien se découvre lépreux. Alertée par la presse, l’opinion internationale s’émeut du sort des lépreux.
1889 : Le 1er avril, le Père Damien meurt lépreux.
1995 : Damien est béatifié.
11 octobre 2009 : Damien est canonisé.

Voici des extraits de ses lettres

Kalawao, Molokai, le 26 novembre 1885 
…J’ai été très peiné par l’autorisation que N.T.R.P. a envoyée à mon confrère, P. Albert, de s’en retourner à Tahiti. Depuis ce temps, je suis toujours seul. Le bon P. Columban vient de deux à trois mois pour me confesser et s’en retourne de suite. Je viens même d’être empêché par notre supérieur, le P. Léonor, de me rendre à Honolulu quand dans l’intervalle je voudrais voir un confrère. Je ne sais trop où cela va aboutir. Je me résigne cependant à la divine Providence et trouve ma consolation dans mon unique compagnon qui ne me quitte pas, c’est-à-dire notre divin Sauveur dans la sainte Eucharistie. C’est au pied de l’autel que je me confesse souvent et que je cherche le soulagement aux peines intérieures. C’est devant Lui, ainsi que devant la statue de notre sainte Mère, que je murmure quelquefois, en demandant la conservation de la santé. Je continue de m’occuper de mon double orphelinat d’enfants lépreux dont le nombre monte au-delà de 40. La moitié d’entre eux, très avancés dans la maladie, n’attendront pas pour aller au Ciel. Je voyage ordinairement en voiture pour aller de l’une de mes églises à l’autre. Le dimanche, je célèbre ordinairement deux messes, je prêche quatre fois et donne deux fois la bénédiction du Saint-Sacrement…

Kalawao, Molokai, mai 1886
…De plus, la terrible maladie dont vous connaissez le commencement fait des progrès effrayants, et menace de me rendre irrégulier sinon impotent pour célébrer la sainte messe, et n’ayant pas d’autre prêtre, je serai privé même de la sainte communion et du Saint-Sacrement. C’est cette privation qui me coûtera le plus et me rendra ma position insoutenable…

Kalawao, Molokai, 26 août 1886
…Immédiatement après la messe, sans laisser au curé le temps de déjeuner, la procession se forme, la croix et un grand drapeau bien lourd à paner ouvrent la marche, puis tambours et instruments de musique en fer blanc suivis de deux associations avec leur drapeau hawaiien. Après viennent les deux ligues de femmes chrétiennes, suivies des hommes, puis les chantres toujours dirigés par mon bon Petero aveugle, qu’un homme robuste guidait sous un parasol ; enfin les thuriféraires, les fleuristes, etc, puis le dais entoure de quatre lanternes champêtres ornées de fleurs des champs. Un reposoir portatif bien orné augmentait l’ornementation de la procession ; en arrivant à la résidence du superintendant, il fut déposé sous la véranda, où j’exposai le Saint-Sacrement. Grâce à la prolongation du chant nous pûmes reposer sur le beau gazon nos pieds et jambes malades et fatigués de la longue marche pendant que nous y fîmes dévotement l’adoration. Après la bénédiction, la procession retourna par le même chemin et le même ordre à l’église…

Kalawao, Molokai, iles Sandwich, le 26 août 1886 
Révérend monsieur, J’ai bien reçu votre lettre si hautement estimée du 4 juin. Je remercie notre divin Sauveur d’avoir, par l’exemple d’un pauvre prêtre qui accomplit en toute simplicité les devoirs de sa vocation, allumé dans votre cœur ce noble esprit de la douce vie du sacrifice de soi-même. Comme vous le dites dans votre lettre, le Saint-Sacrement est vraiment le stimulant pour nous tous, pour moi comme pour vous, qui pousse à renoncer à toutes les ambitions du monde. Sans la présence continuelle de notre divin Maître à l’autel de mes pauvres chapelles, je n’aurais jamais pu persévérer à jeter mon sort avec les lépreux de Molokai. Les conséquences en étaient prévues, mais maintenant elles commencent à se manifester sur la surface de mon corps et se font sentir dans tout mon système. Comme la sainte communion est le pain de tous les jours pour le prêtre, je me sens heureux, bien content et résigné dans le milieu quelque peu exceptionnel où il a plu à la divine Providence de me placer…

Kalawao, Molokai, 5 octobre 1886
…Je suis réputé attaqué moi-même de la terrible maladie. Les microbes de la lèpre se sont finalement nichés dans ma jambe gauche et dans mon oreille. Ma paupière commence à tomber. Il m’est impossible de me rendre encore à Honolulu parce que la lèpre devient visible. Bientôt ma figure sera endommagée, je suppose. Étant sûr que la maladie est réelle, je reste calme et résigné et je suis même plus heureux parmi mon monde. Le bon Dieu sait ce qui est mieux pour ma sanctification et dans cette conviction je dis tous les jours un bon fiat voluntas tuas…

Kalawao, Molokai, îles Sandwich, le 9 novembre 1887 
…Bien que la lèpre ait fortement empoigné mon corps et m’ait défiguré un peu, je continue d’être fort et robuste et les terribles souffrances de mes pieds ont disparu. Jusqu’ici la maladie n’a pas encore déformé mes mains et je continue à dire tous les jours la sainte messe. Ce privilège est ma plus grande consolation, pour moi aussi bien que pour le bonheur de mes nombreux compagnons de misère, qui tous les dimanches remplissent assez bien mes deux églises où je réserve continuellement le Saint-Sacrement. 50 orphelins vivent ici avec moi et ils prennent presque tout mon temps libre. La mort a diminué le nombre de mes malades de manière qu’il m’en reste encore environ 500…

Kalawao, le Vendredi saint 1 1888, 4 heures du matin 
Mon révérend père, 
C’est la quinzième année que nous observons l’adoration nocturne, tout lépreux que nous sommes. J’ai reçu votre petit mot pour l’envoi des caisses américaines. Les matelots du Mokolii me dirent hier soir que lundi le Kilauea doit encore une fois venir pour notre port. Veuillez en profiter pour nous les expédier…

J. Damien des SS. CC.